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16.  X II   Dimanche épuisant hier. Tout le personnel a donné sa démission à mon père. Grâce à de beaux discours, une attitude cordiale, l’effet de sa maladie, sa grandeur et sa force d’autrefois, son expérience et son intelligence, il les reconquiert quasiment tous au cours de négociations privées ou à plusieurs. Franz, un employé de bureau qui occupe une place importante, demande un temps de réflexion jusqu’à lundi parce qu’il a donné sa parole à notre directeur commercial qui part et voudrait entraîner tout le personnel dans la nouvelle affaire qu’il va fonder. Dimanche, le comptable écrit que finalement il ne pourra pas rester, le Roubitschek ne le laissant pas revenir sur sa parole. Je vais chez lui à Zizkov. Sa jeune femme aux joues rondes un visage longiligne et un petit nez grossier qui ne gâte jamais les visages tchèques. Robe de chambre trop longue très lâche à fleurs et tachée. Elle devient particulièrement longue et lâche parce qu’elle fait des mouvements particulièrement rapides pour me saluer, pour disposer convenablement l’album sur la table qui doit servir d’ultime embellissement, et pour aller chercher son mari. Le mari faisant des mouvements semblables, peut-être imités par sa femme qui semble dépendre beaucoup de lui, mouvements rapides avec de forts balancements quand le buste est penché, tandis que le bas-ventre bizarrement reste en retrait. Impression d’un homme connu depuis 10 ans, vu souvent, auquel on a fait peu attention, avec lequel on entre tout à coup dans une relation plus proche. Moins j’ai de succès avec mes exhortations tchèques (il avait déjà signé un contrat avec Roubitschek, mais samedi il était tellement bouleversé par mon père qu’il n’avait rien dit du contrat), plus son visage ressemble à celui d’un chat. Je joue un peu la comédie, ce qui me procure un sentiment très agréable, et, sans dire un mot, je regarde autour de moi dans la pièce avec une mine un peu allongée et des yeux devenus minuscules comme si je poursuivais jusque dans l’indicible quelque chose qui n’aurait été dit qu’à demi-mot. Mais ne suis pas malheureux quand je vois que cela a peu d’effet et qu’au lieu de le voir s’adresser à moi sur un autre ton je dois recommencer à tenter de le convaincre. L’entretien a commencé à propos d’un autre Tullach qui habite de l’autre côté de la rue, et il s’est terminé sur le pas de la porte par son étonnement de me voir porter une veste si légère par ce froid. Significatif de mes espoirs initiaux et de mon échec final. Mais j’arrive quand même à le persuader de venir chez mon père l’après-midi. Mon argumentation par endroits trop abstraite et trop formelle. Erreur de ne pas avoir fait venir sa femme dans la pièce.